Correction possible pour une introduction de dissertation qui concerne ce sujet :
Le professeur de langue et de littérature anglaise J.R.R. TOLKIEN a surpris tous ses collègues de la prestigieuse université d’Oxford en publiant en 1954 et 1955 sa trilogie : Le Seigneur des Anneaux. Lui-même ne s’attendait pas à ce que ce soit une telle réussite littéraire mondiale ! Dans cette œuvre inclassable qui contribua à faire connaître le genre « heroic-fantasy » au reste du monde, TOLKIEN met en scène des personnages fictifs qui parlent symboliquement de la condition humaine, et particulièrement du désir ardent du pouvoir. Parmi ses personnages nous prendrons comme exemple Aragorn et Boromir. Tous les deux, avec d’autres aventuriers, sont missionnés pour accomplir une dangereuse quête qui consiste à accompagner Frodon Sacquet, un hobbit qui se retrouve porteur de l’Anneau de puissance, anneau qui symbolise justement le désir ardent dont nous parlions, pour qu’ils puissent l’amener jusqu’aux terres sombres du Mordor afin de le détruire. Ce qui nous intéressera ici, pour le sujet de ce devoir, c’est que Boromir et Aragorn n’auront pas du tout la même manière de se comporter face à l’Anneau.
La liberté selon Thomas d’Aquin est le pouvoir qui nous est confié de chercher et d’accomplir le bien. Ce n’est pas simplement le pouvoir de choisir sans être dominé par un maître extérieur, comme on le croit souvent, mais le pouvoir de choisir de faire le bien. Cette tendance qui nous porte vers un bien, Thomas d’Aquin l’appellera désir. Ainsi, nous pouvons croire que loin de diminuer notre liberté ou de la dénaturer, notre désir de nous battre pour le bien en combattant le mal, est l’expression même de la plus belle liberté que nous puissions atteindre. C’est ce qui motive Boromir quand il demande à Frodon de lui laisser l’Anneau, alors qu’ils se trouvent tous deux sur l’une des collines qui surplombent les fracas du puissant fleuve nommé Rauros. Il croit que cet Anneau de puissance lui permettra de vaincre le méchant Sauron, figure du mal dans l’œuvre de TOLKIEN. Il semble alors impossible que notre désir puisse corrompre notre liberté quand celle-ci est bien conçue.
Pourtant, l’intensité du désir d’acquérir l’Anneau de puissance poussera Boromir à manquer de discernement. Loin de lui permettre d’atteindre le but qu’il se donnait, ce désir mettra même en danger Frodon au chapitre X du Seigneur des Anneaux. Boromir, fier de sa force et de son courage, se laissera posséder par son désir, et ce n’est qu’après la disparition de Frodon, rendu invisible par le pouvoir de l’Anneau magique, qu’il prendra conscience qu’il avait perdu la raison, qu’il n’était plus maître de lui-même. En cherchant à obtenir l’Anneau pour combattre son ennemi, il croyait par là servir le bien, alors que lui-même avait perdu sa liberté en choisissant un moyen de l’atteindre incompatible avec ce noble but. En généralisant, nous pourrions dire alors que certains de nos désirs nous rendent esclaves.
C’est pourquoi nous répondrons à la question de savoir si nos désirs peuvent corrompre notre liberté en trois temps. Tout d’abord en distinguant le libre arbitre de ce que la tradition appelle la liberté de qualité, nous supposerons que nos désirs ne peuvent pas corrompre notre liberté quand celle-ci est bien conçue. Puis dans un deuxième temps, nous montrerons qu’une conception saine de la liberté ne suffit pas, qu’il est préférable de ne pas se laisser piéger par certains désirs. Leur intensité peut en effet nous faire perdre la maîtrise de nous-mêmes. Enfin, nous montrerons qu’il ne suffit pas de concevoir correctement la liberté, qu’il ne suffit pas de savoir reconnaître parmi nos désirs ceux qui conviennent et ceux qui représentent un danger, encore faut-il avoir les forces morales suffisantes pour les apprivoiser et utiliser l’énergie qu’ils nous fournissent dans une bonne direction. C’est là que les vertus, et particulièrement celles de prudence et d’humilité qu’incarne le personnage d’Aragorn, le futur roi du Gondor, apparaissent comme les meilleurs tuteurs pour faire croître dans notre vie la liberté de qualité.
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Pour vous faire mieux comprendre ma réponse finale, j’ajoute le paragraphe suivant, même si dans une introduction réelle je ne le mettrais pas, et je garderais tout cela pour la 3ème partie :
Aragorn ne sera jamais tenté dans toute l’œuvre du Seigneur des Anneaux par l’Anneau de puissance. Il possède en effet la vertu de prudence acquise par son éducation reçue des elfes et par son expérience due à son grand âge : il a 87 ans quand il rejoint Frodon. Il sait donc qu’il est dangereux d’approcher l’Anneau. De plus, il cultive aussi l’humilité et sait ainsi qu’il peut se tromper. Il sait qu’il a besoin de réfléchir régulièrement et d’écouter son cœur afin de réussir à discerner ce qu’il doit faire s’il veut réellement se mettre au service du bien et développer sa liberté de qualité.